Conciliabules autour du vocabulaire

Un mot rencontré ce dimanche à Dole dans le Jura :

le treige, une ruelle très étroite, souvent en pente.

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Je ne suis pas parvenu à en circonscrire l’origine étymologique. :worried:
Il semble que ce soit un mot isolé, utilisé en Franche-Comté.

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C’est un joli coin Dole! On retourne par là- bas cet été normalement :heart_eyes:

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Profitez bien ! La vieille ville est un délice pour les scénarios de cape et d’épée… mais je pense qu’il y a trop peu de monstres pour toi !
… à moins que… un silure énorme semble avoir élu domicile dans les eaux du canal.
Du boulot pour Geralt ?

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Pour être honnête je m’identifie bien plus au hobbits qu’aux sorceleurs :wink: Les monstres, bien peu pour moi! Vive les campagnes verdoyantes, les mets délicats et les chants jusqu’au bout de la nuit. :wink:

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Héraldique du jour : le blason du Duché de Normandie

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De gueules aux deux léopards d’or, armés et lampassés d’azur

Traduction en français courant : Blason de fond rouge, aux deux léopards jaunes, aux griffes et à la langue bleues

Notons qu’en héraldique, le lion et le léopard sont le même animal :

  • le léopard regarde de face
  • la tête du lion est représentée de profil.

Lorsque notre félin est à quatre pattes (ou disons trois, puisque l’une est levée), il est dit passant. Lorsque le roi des animaux se redresse sur ses pattes arrières, il est dit rampant - et oui, je suis bien d’accord, c’est assez contre-intuitif…

De plus, le léopard étant passant en standard, on ne le précise pas. Si ce brave léopard avait l’idée de se relever, pour complexifier le tout - mais les férus d’héraldique adorent cela - on ne le nommerait pas léopard rampant mais léopard lionné.

Mais le mot que je voudrais mettre en avant aujourd’hui est lampassé.

  • Le lampas, jusqu’au XIXème siècle, est le gosier - et non la langue. Lampas est encore employé dans le langage vétérinaire ou d’élevage, pour certains animaux - Cheval, etc.

  • Lamper signifie boire, se mouiller le gosier. C’est une forme nasalisée de laper que nous employons plutôt pour les animaux… qui utilisent souvent leur langue pour boire. J’imagine que c’est là l’origine du glissement de sens du gosier vers la langue…

Source : le CNRTL

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Nouvelle trouvaille :slight_smile:

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Merci pour cette belle liste de verbes animaliers !

Allez, je suis un peu héraldique en ce moment. Voici les noms anciens des émaux, les couleurs.

  • Les métaux
    • Or : jaune
    • Argent : blanc
    • beaucoup plus rare, Fer : gris
  • Les autres couleurs, parfois désignées sous le terme « émaux », au sens de « non-métalliques ». Les gens d’héraldique semblent priser ces débats…
    • Gueules : rouge
    • Sinople : vert. Prasin pour une nuance de vert clair
    • Azur : bleu
    • Sable : noir
    • Orangé : orange
    • Pourpre : violet, parfois de l’indigo au rouge foncé. Sanguine : variante rouge foncé
    • plus rare Tanné : marron

La principale règle de composition est de ne pas faire se toucher des zones de même couleur. De plus, on évite de laisser se toucher deux zones métalliques. Un blason d’argent à l’aigle d’or n’est pas recommandé. Mais il y a des exceptions, l’une d’elles restant célèbre : le blason du royaume de Jérusalem :
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D’argent, à la croix potencée d’or, cantonnée de quatre croisettes du même.

De même, on évite de laisser une couleur non-métallique sur une autre, pour les larges zones, comme un blason d’azur au lion de sinople.

Les partitions de l’écu (son découpage en zones), les pièces et meubles, sont répertoriés et discutés à l’infini, je vais donc m’arrêter là !

Source la plus concise à mon avis.

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On a une étymologie pour le mot héraldique ?
Est-ce que ça vient bien de hérault – à ne pas confondre avec le héros ?

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Tu as raison, commençons par le commencement. Je vais promptement consulter l’une de mes bibles préférées - car on ne saurait sans péril se fier à un seul livre sacré, n’en déplaise à certains…

Il serait tentant d’imaginer que le herald anglais descend d’une forme ancienne du héraut français.
Mais il semble que non. D’après le CNRTL, Chrétien de Troyes dans le Chevalier à la charrette cite un hyraut d’armes vers 1176-81. Le mot héraut viendrait de l’ancien bas-francique heriwald « héraut », forme infléchie de hariwald proprement « chef d’armée », composé de hari « armée » et de wald « qui règne ».

Il semble qu’il y ait eu un latin médiéval heraldus, et donc là, c’est très dur d’aller chercher l’influence déterminante entre le francique, le saxon et les composantes du vieux français… En tout cas, ce n’est pas anglais ! :stuck_out_tongue_winking_eye:

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Tu veux que je vous dise d’où vient le « Herald » anglais ? Ou tout le monde a deviné ? :smiley:

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Vous aimez les frères siamois, en voilà !

Repaire: domaine, habitation, lieu où l’on revient après une absence, attesté au début du 12ème siècle. Repairier signifie regagner son repaire, « revenir chez soi ».

  • Il s’agit de se reposer, de reconstituer ses forces. Repairier a également interféré avec re-parer pour donner réparer, ce dont atteste le cousin anglais to repair.
  • Au 12ème siècle, un glissement de sens inclut le repaire refuge d’animaux sauvages, puis plus tard, le repaire lieu de réunion d’individus dangereux.

Repère : signe, indice ou marque permettant de retrouver un point, un emplacement, un itinéraire, ou plus généralement de situer quelque chose dans une chronologie, un ordre, une continuité, un ensemble de faits ou phénomènes.

Doublet lexical : Repère et repaire ont longtemps été employés indifféremment jusqu’au 17ème siècle. Toutefois le lat. reperire « retrouver » a spécialisé l’emploi et le sens de « repère ».
Autrement dit, si vous vous trompez, il n’y a qu’à prétendre que vous employez la langue ancienne !

Source CNRTL ici et .
Et merci à @OldGirlNoraArlani de m’avoir signalé que j’avais amalgamé les deux, il y a… quelques années !

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MERCI mille fois pour tous les verbes décrivant des cris d’animaux et pour les termes héraldiques (je connaissais davantage ces derniers que les premiers).

En ce qui concerne le héraut d’armes, je ne peux résister à un petit topo historique concernant ce personnage qui avait une fonction complètement délirante durant le Moyen Age (pas seulement « reconnaître les bannières », même si c’était bien évidemment l’un de ses rôles) : il existait des « poursuivants d’armes », qui devenaient après quelques années « hérauts d’armes », et certains d’entre eux étaient élus « rois d’armes », à la tête de « marches d’armes » (des circonscriptions à l’intérieur desquelles ils enregistraient et contrôlaient tout ce qui touchait aux armoiries).

Ils étaient parfaitement inviolables sur un champ de bataille, pouvaient traverser les lignes ennemies pour aller porter des messages, demander une suspension des combats, négocier une capitulation, rencontrer les prisonniers… Ils pouvaient rédiger les testaments, identifier les victimes, et après les combats, ils se réunissaient pour compter les morts et attribuer la défaite au parti le plus touché ; enfin, ils organisaient les funérailles. En temps de paix, ils organisaient les tournois, adoubements, etc… et sanctionnaient tous ceux qui ne respectaient pas les règles très strictes de l’héraldique. Ils voyageaient beaucoup et étaient exemptés d’impôts. Bref, un métier très avantageux !

Source : L’héraldique (Claude Wenzler). Oui, j’ai des lectures étranges.

Sinon, le mot du jour sera le talmelier. Il s’agit tout simplement du boulanger au Moyen Age. Je profite de cette rubrique pour faire un peu de pub pour le château médiéval de Guédelon, dans le beau département de l’Yonne. C’est là que j’ai rencontré, pas plus tard qu’avant-hier, un talmelier du XIIIème siècle. :grin: Si vous ne connaissez pas Guédelon et que vous n’habitez pas trop loin, venez : c’est extraordinaire !!! Il s’agit d’un château du XIIème siècle entièrement bâti… au XXIème, avec des techniques médiévales. Petit lien si ça vous tente : https://www.guedelon.fr/

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Oh, merci pour ce joli talmelier, et les réflexions sur l’étymologie et les attributs des métiers du moyen âge ! :smiling_face_with_three_hearts:

Coucou, revoilà les frères ennemis !

Chaque fic apporte son lot de vérification et de découverte, parfois tard la nuit.
Cette fois ce fut le couple suivant : cuisseau ou cuissot de chevreuil ?
Voici la réponse.

Le cuissot désigne la cuisse du gros gibier (cerf, sanglier, chevreuil), donc sauvage. Il peut aussi s’agir d’une pièce d’armure (voire plusieurs articulées), qui couvre évidemment la cuisse.

Le cuisseau est une invention plus récente de nos bouchers : la partie du veau qui comprend la cuisse et la région du bassin. Cette acception s’étend parfois à tous les gros animaux domestiques.
Je dis récente, car Mallarmé, dans la revue La Dernière Mode (en 1874), parle d’un Cuissot de pré-salé à la bretonne, évidemment de l’agneau.

Une célèbre dictée
Prosper Mérimée est l’auteur d’une dictée infligée à la cour impériale de Napoléon III. Elle est restée célèbre, car le couple impérial n’aurait guère brillé par sa rigueur orthographique.
Mais pourquoi diantre divergeai-je à ce point ? Eh bien la fameuse dictée opposait cuissot et cuisseau !
Pour parler sans ambiguïté, ce dîner à Sainte-Adresse, près du Havre, malgré les effluves embaumés de la mer, malgré les vins de très bons crus, les cuisseaux de veau et les cuissots de chevreuil prodigués par l’amphitryon, fut un vrai guêpier. (…)

Sources CNRTL ici et ainsi que Mérimée

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Alors là il faut que je vous inscrive celui-là !

Tôtif, tôtive : le contraire de tardif, tardive… :scream:
Il s’adjoint les services de l’adverbe « tôtivement »

J’en suis restée comme deux ronds de flan… Je l’avoue, j’ai cru que c’était une blague ou une maladresse. Du même genre que le nom « serviteuse »

Tout faux, OldGirl ! :rofl:

Là où je me serais contentée d’une heure trop matinale, qu’elle soit indue, ou tout au moins des plus précoces. Que nenni !
Existant depuis des temps… lointains (19e siècle), il est remis au goût du jour en 2014. Plusieurs articles y font référence (avec d’autres mots et verbes pour le moins… créatifs).

Mais ce n’est pas tout !

Même le CNRLT connaît « serviteuse » qu’il signale comme synonyme de « serviteure ». Je tombe par terre.
Mais qu’est-ce qu’ils ont fait de notre bonne vieille servante ?
L’histoire ne le dit pas.
Ce qui est dit, c’est que ce sont des termes de « Moyen français » (comprendre : plutôt médiévaux)

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– ça me soûle !
– ben pourquoi ?
– c’est toujours pareil avec toi !

Brisons là cette fascherie… pour une fois, je ne m’en vais point rouspéter !
Car cette expression si contemporaine nous rappelle – bien fortuitement, l’étymologie n’étant pas commune – ce vieux verbe de notre langue, souloir, qui signifiait avoir l’habitude de ou avoir coutume de.

La Fontaine dira, par exemple, en guise d’Epitaphe au paresseux :
Quant à son temps bien sut le dispenser,
Deux parts en fit, dont il soulait passer,
L’une à dormir, et l’autre à ne rien faire.

Source ici et

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C’est l’heure des antiquités !
Aujourd’hui c’est le tour du vieux verbe Adonner.

La signification beaucoup plus neutre et universelle du Donner moderne a évidemment perdu des finesses de ce verbe.

Adonner subsiste encore en français actuel dans quelques acceptions :

  • S’adonner à quelque chose : s’y consacrer, avec parfois une nuance d’ardeur ou d’abandon.
  • Le vent adonne : sa direction évolue, s’écartant de l’axe du navire, ce qui favorise la marche de ce navire.

Voici les sens divers d’autrefois que j’ai pu relever :

  • Godefroy s’adonne à l’abbaye comme oblat. Le brave homme se consacre, donne sa personne à Dieu et vit au monastère, mais sans en prononcer les voeux.
  • Que ton cuer ne s’adonne à nul des sept mortels péchiers ! ou s’adonner à boire : se livrer sans retenue à une activité. Mais peut aussi être employé en bonne part : s’adonner à l’oraison. C’est le sens qui perdure aujourd’hui.
  • Exposer ou soumettre quelqu’un à quelque chose : Pour la terreur d’un tant subit esclandre Fut l’humain genre asprement estonné, Et tout le monde à horreur addonné
  • Donner sur un lieu, regarder vers ce lieu ou se présenter dans une direction : En tertre qui au bois s’adonne ; Cele voie qui là s’adone
  • Se montrer favorable, se prêter à : Puis que le temps ainsi s’adonne. Sans doute le sens le plus proche du « adonner » de la navigation à voile.

S’il fallait tenter un équivalent moderne qui embrasse toutes ces significations, ce serait peut-être « tourné vers » ?

Sources : ici et

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Je viens de tomber sur une précision de Robert Merle qui déclare, en note de Fortune de France, que « baragouiner » se rencontre déjà au 16ème siècle, par exemple dans la traduction de Montaigne de La Théologie naturelle de Raymond Sebon.

Notre médiéviste préféré réfute l’explication selon laquelle les paysans chouans prisonniers des « bleus » (donc à la fin du 18ème siècle), déportés en région parisienne, seraient à l’origine de ce mot. Ce sont probablement des bretons qui « bara-gwin-aient », mais certainement bien avant le 16ème siècle…

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Bien,
J’ajoute un mot au pot commun.

Je suis tout à fait pour les mots qu’on va pouvoir recaser dans une fic. Ainsi je ne vous parlerai ni de tautologie, truisme ou pléonasme.

En voici un que je n’ai jamais lu par ici

BRINGUEBALER / BRINQUEBALER :
Balancer, remuer ou agiter en faisant du bruit. Rouler en cahotant (avec du bruit).
Balancer de droite et de gauche, transporter en secouant (sans ménagement)

A six heures, la charrette du camelot entrait dans la ville par la porte de l’Est. Les riverains grincheux l’entendaient brinquebaler en remontant la rue principale. A sept heures, l’industrieux personnage, installé sur la place du marché, haranguait déjà les commères pour leur vendre mille colifichets et brimborions.

:smiley:

Source du Dico de d’habitude.

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Ça me semble pourtant assez courant dans le langage quotidien, non?

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Nitescence ? Euh… à part ici, je ne l’ai jamais entendu ! :smiley: Faut-il que je choisisse mieux mon entourage ?

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