J.K.R. - l g b t +

C’est venu d’une question du même ordre XD Je veux écrire des fanfictions sur Harry Potter depuis longtemps (pour l’instant, je n’ai commis qu’une petite nouvelle sans prétention), et je ne sais pas trop quoi faire maintenant que je vois les valeurs de Rowling… Écrire une fanfiction, c’est faire de la publicité gratuite pour une licence. Et est-ce que j’ai vraiment envie de promouvoir une licence dont la communauté est certes remplie de gens adorables mais qui rapporte des sous à l’aut’conn… dès que quelqu’un achète un produit HP ?
Dans un premier temps j’ai décidé d’ajouter des personnages trans dans tous ces projets de fics, mais c’est un pied de nez un peu vain dans l’absolu. Et puis pour être honnête, mon fandom favori est Star Wars… Est-ce que c’est pas un peu hypocrite de ma part de ne plus vouloir m’investir dans les fics HP tout en continuant à écrire du Star Wars alors que Disney a un nombre incalculables de polémiques à l’arrière-train (genre tourner le live action de Mulan dans le Xinjiang, à côté des camps d’internement Ouïghours, et remercier cette région au générique, pour prendre un truc assez récent et rester dans le soft power) ?
Bref, j’espère que ce mémoire me permettra d’avoir quelques idées pour Harry Potter, et puis peut-être aussi de façon plus générale… C’est pas gagné !

Oui, j’ai eu un peu de mal à trouver, mais ça y est j’ai une nouvelle directrice de mémoire :grin:

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Ce qui me dérange dans la polémique JKR c’est qu’à chaque fois qu’elle a eu des dérapages transphobes c’était pour défendre les femmes cis à ce que j’ai compris (déjà, premier problème : moi je suis nulle en anglais, donc je me fie aux traductions françaises des tweets récupérés dans les grands médias, ce qu’il ne faut pas faire normalement, toujours aller à la source primaire). Elle refuse de tenir compte des personnes non binaires, des femmes trans et des hommes trans, sur des sujets qui parfois les concernent (par exemple les violences conjugales et les maltraitances obstétricales).
Ça te donne une bombe de cochoncetés qui favorise la scission des luttes contre les formes de sexisme et, de fait, les affaiblit. Sa position est problématique, celles d’une partie de ses soutiens aussi, celles d’une partie de ses détracteurs aussi, et ce qu’il reste dans les grands médias (qui eux veulent juste faire du buzz) c’est « faut-il continuer de promouvoir Harry Potter ? » alors que franchement, c’est pas important de lire ou pas Harry Potter par rapport aux violences du monde réel.
Je suis une indécrottable misanthrope et je ne peux m’empêcher de penser qu’il y a une forme de vice des internautes à vouloir détourner des minorités (ou des majorités d’ailleurs) opprimées de leurs problèmes. Je vais être claire : quand tu regardes chez les sympathisants d’extrême droite et de de droite conservatrice, ça les fait rire de voir une auteure qui se revendique féministe se battre contre des militants LGBTQ+

Moi je me suis retrouvée à vouloir faire des références au monde d’HP (notamment le code couleur des quatre maisons de Poudlard pour représenter les personnalités des protagonistes) dans une fiction queer parce que ça fait partie de la culture générale, quasiment tout le monde a les grandes références de l’univers, c’est un monument de la Pop culture, comme Star Wars, Pokémon, Disney, Marvel et DC, on est sur le top 3 des grosses licences (puisque Disney a racheté trois trucs cités ci-dessus). Sauf que vu que les fictions avec des persos queer sont surtout lues par des gens qui les soutiennent ou sont concernés directement, bah ils sont généralement aussi sensibles face à l’affaire JKR ou marchent sur des oeufs. Donc est-ce que ça ne remue pas le couteau dans la plaie ?

Personnellement, je suis toujours partisane de séparer l’artiste de son œuvre, dans tous les cas, car sinon c’est une forme d’obscurantisme (c’est d’ailleurs pour ça que tu as des gens de droite qui refusent de lire des livres de gauche et des gens de gauche qui refusent de lire des livres de droite, c’est le même mécanisme). Et pour les histoires de pognon, en vrai, c’est un peu un faux débat je trouve, car tout le monde donne de l’argent à Jeff Bezos, Elon Musk, Boloré, Bernard Arnault qui sont des :poop: le sourire en moins. (Effectivement j’avais oublié Disney mais c’est vrai aussi.) Et on se focalise sur une femme (peu importe qu’elle soit cis ou trans, c’est une femme, donc déjà plus opprimée que les hommes) qui a écrit une œuvre profondément positive (même si dernièrement quelqu’un m’a râlé dessus en disant qu’il y avait quand même des schémas oppressifs dedans) et fait plein de caritatif. C’est… Je ne sais pas, bizarre et malaisant.
MAIS, c’est vrai que chaque œuvre est une partie de l’âme de son auteur.e on ne peut pas s’en défaire, et il y a souvent une corrélation entre les deux. Et chacun.e est libre de lire ce qu’il elle ou iel veut. Donc boycotter HP si ça leur fait du bien, qui pourrait les blâmer ? Au pire, juste mettre en garde qu’il ne faut pas trop se fermer aux fictions pour ce genre de motif et bien prendre garde à ne pas se couper du monde aussi. C’est un autre risque : si HP n’est réservé qu’aux hétéros ou aux queers qui ne soutiennent pas la cause trans, ça refait une scission importante dans la culture générale mondiale.

J’étais étonnée de voir qu’une ATER pouvait encadrer des étudiants de master, m’enfin Paris 8 a l’air de faire vraiment le maximum en fonction de leurs moyens. J’ai découvert cette fac il y a peu et j’ai rarement vu des enseignants aussi soucieux de leurs étudiants (c’est étonnant, j’ai pas été habituée à ça dans le milieu universitaire :sweat_smile:)

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Ce qui implique déjà de partir du principe qu’il est nécessaire de défendre les femmes cis contre les personnes trans…

Si ce n’était que ça, je suis d’accord ça serait vaguement risible et pas très important. Sauf que Rowling fait aussi du lobbying politique, par exemple en s’engageant aux côtés des réactionnaires (qui se moquent peut-être d’elle mais ne vont pas cracher dans la soupe si elle les soutient) contre le Gender Recognition Act en Écosse. Elle a également fait la promotion de transphobes notoires, notamment en soutenant des levées de fond pour des procès contre des assos trans-friendly. On peut également noter la création de son « centre d’accueil » (entre guillemets parce que ce n’est en réalité pas du tout un refuge, mais un centre de soutien et de conseil) interdit aux personnes trans, entre de nombreux autres.
Si tu veux un historique complet, la Gazette tient cet article à jour.

Je ne peux que te conseiller d’en parler à des personnes concernées, qui seront plus à même de t’éclairer sur leur vécu :wink:

J’ai toujours trouvé cette façon de faire étrange… L’artiste ne se sépare pas de son œuvre, alors pourquoi devrait-on le faire ? Je ne peux pas apprécier un tableau de Picasso en sachant que la femme représentée était abusée et sous emprise. Je ne peux pas apprécier J’accuse en sachant que Polanski utilise ce film pour faire un parallèle direct entre Dreyfus et lui. Il n’y a pas d’un côté l’artiste qui fait des trucs horribles dans sa vie privée, et de l’autre côté son œuvre qui est pure ou immaculée, c’est un tout. Je ne pense pas qu’il soit possible ni souhaitable de juger l’un sans juger l’autre aussi.

« Il n’y a pas de consommation éthique sous le capitalisme », comme dirait l’autre (l’autre étant en l’occurrence Slavoj Žižek). Il faut bien choisir ce qu’on consomme tout en ayant conscience de ses contradictions.

Alors je suis d’accord dans l’absolu, mais c’est quand même important de rappeler « toutes choses égales par ailleurs ». C’est pour ça que ce genre d’observation est souvent considéré comme plus théorique qu’autre chose et qu’on essaie de ne pas l’appliquer à des personnes concrètes. « Les femmes » sont, toutes choses égales par ailleurs, défavorisées par rapport « aux hommes ». Parce que la réalité matérielle a la fâcheuse habitude ne pas être « égale par ailleurs »… En l’occurrence, Rowling est certes une femme mais elle aussi multimillionnaire. Ça peut aider. Autant dire que je vais pas pleurer sur son sort tout de suite.
Évidemment ça n’explique ni n’excuse le sexisme qu’elle peut se prendre. Mais à ma connaissance, elle ne subit pas de harcèlement spécifiquement sexiste : elle s’entend très bien avec de grandes figures de l’extrême-droite ce qui la préserve de harcèlement de leur part, et ses principaux adversaires sont des féministes, qui refusent donc (à raison) de recourir de tels moyens contre elle.

Harry Potter regorge effectivement de clichés racistes, antisémites, pro-esclavage, j’en passe et des meilleurs. Si tu veux faire le tour de la question, cet essai de Shaun est assez exhaustif sur les diverses problématiques que de nombreuses minorités ont tenté de souligner depuis longtemps (avant que le call-out transphobe de Rowling ne permette de la faire un peu tomber de son piédestal). Par contre, je crois que les seuls sous-titres français sont ceux de la traduction automatique :sweat_smile:

Bref, on commence à s’éloigner assez du sujet ! Mieux vaut en rester là, je pense ^^

Oui, ça m’a beaucoup surpris·e aussi !

On se fait chouchouter :blush:

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Oui et non, puisque ça touche un peu à ton futur mémoire de M2. :grin:

Mais pour éviter d’obliger Oldie à opérer une migrations des posts, je réponds juste à deux choses :

Alors, y a un énorme problème sur ce sujet, c’est que je n’ai jamais vu un article neutre dessus (bien sourcés oui, mais toujours avec des commentaires orientés en-dessous). Celui là ne fait pas exception. Ils sont tous soit à charge, soit à décharge, ce qui relève une absence totale de tentative d’objectivité et d’impartialité des gens qui rédigent les articles, et moi ça me dérange en tant que chercheuse en SHS. En tant que citoyenne, je comprends bien pourquoi on en est là. :sweat_smile:
Déjà, un truc qui commence par :
" CW : transphobie, intersexophobie
Cet article est rédigé par un homme cisgenre blanc, avec tous les privilèges que cela implique. Il a été relu par des personnes concernées, ce qui ne le rend néanmoins pas représentatif de l’expérience et de la perception de toutes les personnes trans.
"
Tu sais que ce ne sera pas objectif.

L’objectivité est impossible à atteindre, même quand on fait de la recherche, mais c’est un effort qu’on doit faire quand on fait du journalisme d’investigation, de l’histoire, de la socio ou de la psycho, même en littérature. Le cas JKR est toujours traité par des militants et/ou des fans, donc y a aucune objectivité, jamais, dans les articles. En histoire (puisque c’est ma branche) tu n’es pas supposé juger ce que tu vois, et tu dois t’efforcer en permanence de ne pas te faire influencer par ton propre vécu (ce qui est extrêmement difficile et la neutralité absolue est inatteignable, c’est un combat intellectuel de chaque instant), car l’objectif c’est d’analyser globalement une situation, d’en capter les tenants et les aboutissants, les liens de cause à effets et les mécanismes sociaux sous-jacents.

Ce qui m’amène à ma deuxième réponse :

Je trouve ça super intéressant que tu utilises le mot « juger ». C’est toute la divergence de mon point de vue, moi je ne juge pas, j’analyse.

Quand je dis que je sépare l’artiste de son œuvre, tout dépend pourquoi. Dans une analyse littéraire, on ne peut pas faire scission, puisque l’artiste s’inscrit dans un contexte historique. C’est ce qu’on rappelle sans arrêt pour « les dix petits nègres », ou pour les clichés racistes dans Tintin. C’est vrai pour toutes les œuvres. Tu as le contexte historique, le contexte social de l’auteur (son histoire personnelle), son engagement politique s’il y en a un, sa personnalité, sachant que sur ce dernier point, plus tu vas loin dans le passé, et plus c’est dur à définir. On ne peut se fier qu’à notre propre analyse des sources connexes (les portraits faits par leurs proches, leurs détracteurs, les historiens plus anciens que nous…). C’est vrai que c’est beaucoup moins le cas pour les artistes contemporains. C’est plus facile d’avoir un portrait de JKR qu’un portrait de Jane Austen.

Moi, de par mon profil et mon passif professionnel, j’ai la fibre scientifique. Je lis un livre parce qu’il m’intéresse, je ne regarde pas qui est son auteur (hors livre pour le boulot). Je me fiche de savoir ce qu’il est ou ce qu’il fait, ce qui m’intéresse c’est le contenu. J’utilise le contenu et je juge le contenu si j’ai envie de le juger. Il faut que je « tombe amoureuse » d’une œuvre pour que j’en vienne à regarder qui est son auteur plus en détail. Sinon, il m’arrive juste de vérifier la véracité des propos tenus (sur les énoncés scientifiques, historiques, sociaux, etc. pour voir si je peux intégrer les informations à ma culture générale OU dans les cas où ça me paraît très fumeux). Et c’est effectivement à ce stade que je comprend un peu mieux pourquoi il y a autant de ferveur autour de JKR. J’aime bien Harry Potter, mais je ne suis pas archi fan, je ne fais pas partie des potterheads, donc au final je prends de la distance avec l’œuvre et son auteur. Si j’étais aussi fan d’HP que je peux l’être de Pokémon, peut-être que je défendrais bec et ongle JKR quitte à être dans le déni de ses attaques transphobes ou en tenir moi-même. Cela dit, je ne m’intéresse vraiment pas beaucoup aux personnes réelles (auteurs/dessinateurs/peintres/réalisateurs). Je trouve que ça a un côté « culte de la personnalité » qui m’a toujours agacé.

Donc moi ce qui me paraît étrange c’est de chercher la pureté morale jusque dans l’identité de l’artiste. Et le rapprochement que j’en fais, c’est que c’est le même mécanisme qui par le passé nous a conduit a censurer des femmes parce qu’elles étaient des femmes, des personnes de couleur parce qu’elles étaient de couleur, des juifs parce qu’ils étaient juifs…
Souvent quand j’explique ça, les gens ont du mal à comprendre mon point de vue, parce que censurer une œuvre parce que son auteur était catholique dans un monde protestant ça apparaît comme une discrimination profondément injuste (et ça l’est), alors que boycotter une œuvre parce que son auteur est un violeur ça apparaît comme une justice et une preuve d’éthique.
Pour moi, dans les deux cas, c’est de l’obscurantisme. De mon point de vue d’historienne, c’est toujours le même mécanisme de pensée : on exclue de l’Art tout comportement ou pensée jugée subversive, on cherche toujours la vertu. Bien sûr, en tant qu’humaine du XXIe s. avec des valeurs, je suis profondément outrée et dégoutée qu’un homme puisse violer une femme, puis se balader dans la nature, qu’on continue de lui faire des sourires à une cérémonie des prix quelconque, ou qu’on fasse comprendre à des personnes trans qu’elles valent moins que des personnes cis, mais en tant qu’historienne, je sais que notre échelle de valeur n’est qu’une échelle de valeur à l’instant X, qu’elle peut changer, en mal ou en bien, et que si je commence à trier les livres non pas en fonction de leur contenu mais de la personnalité de leur auteur, je vais m’enfermer dans une pensée cloisonnée (même si elle vertueuse, elle est cloisonnée). Ça je m’y refuse.
Le risque que j’y vois, c’est qu’on se prive d’une partie de la connaissance. Pourtant, je pense qu’on a moins cette peur là aujourd’hui grâce à internet. Parce qu’on sait que si on dit « on ne regardera pas ce film, parce que le réalisateur a eu des condamnations pour viols, agressions sexuelles et qu’il ne respecte donc pas les femmes ni les droits des femmes » on peut avoir quasiment l’intégralité des informations dans d’autres œuvres de fictions. Et j’ai l’impression que c’est aussi pour ça qu’on a de plus en plus tendance à attendre un bon comportement des auteurs et des artistes, parce que si ils ne sont pas de bons humains, justes et droits, on peut les remplacer, il y a tellement d’artistes et d’auteurs accessibles partout dans le monde, qu’on peut facilement trouver aussi bien ou mieux qu’eux avec une caution morale. Je me méfie un peu de cette pensée là, car les documentaires que j’ai vu sur les algorithmes évoquent le « miroir des convictions ». C’est à dire que si en théorie on a accès à l’intégralité de la connaissance humaine via internet, on ne voit que ce que les algo pensent qu’on aime voir et entendre. Ainsi, même sur internet, on reproduit les schémas du monde réel, à savoir que si tu es dans un milieu socio-culturel, tu reproduis ce schéma sur internet et il t’enferme encore plus en te faisant croire que le reste du monde pense comme toi. Bref, c’est pour ça que j’essaye de diversifier mes lectures (dans la limite de mes goûts) et que je ne regarde que très rarement qui sont les auteurs.

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