Avec la bénédiction des modérateurs, je viens créer une section : « Vos recommandations Fyctia ».
Mais… Fyctia, c’est quoi ça ?
Fyctia est une plateforme hybride, à mi-chemin entre Wattpad et un site d’auto-édition pour ebooks. Sur cette plateforme partenaire de Hugo Publishing, des concours d’écriture sont organisés en permanence. Un nouveau thème est publié tous les trois mois et les auteurs motivés sont invités à publier leur texte en ligne sur ce thème choisi par l’équipe éditoriale.
Pendant les trois mois qui suivent, les éditeurs parcourent les textes et vont sélectionner ceux qui leurs semblent les plus prometteurs. Ils les soumettent ensuite à un jury, composé d’éditeurs et de personnalités littéraires de leur réseau. Le gagnant remporte une publication papier chez Hugo ou un partenaire.
Mais le concours n’est que le sommet émergé de l’iceberg Fyctia ; l’avantage de cet appel à texte particulier, c’est que tous les textes des participants sont accessibles gratuitement aux auteurs et aux lecteurs. Pour ceux qui aiment la lecture en open-access c’est un petit paradis. Petit, parce que le risque c’est de ne pas avoir la fin des histoires. En effet, le règlement du concours impose de ne pas dépasser les 60% de l’histoire, afin de préserver l’intérêt commercial du ou des gagnants du concours. Une fois le concours terminé, les auteurs sont libres de poster ou non la fin de leur histoire, soit en accès gratuit (comme ici, sur fanfiction.fr), soit en autopublication sur Stories by Fyctia.
Il y a donc un risque pour que les « perdants » s’interrompent au bout des trois mois ou qu’ils publient la fin de leur histoire en accès payant. Je préfère le souligner, car si vous vous plongez corps et âme dans une histoire passionnante, gardez à l’esprit qu’il faudra peut-être rester sur votre faim…
Or donc, j’ai découvert Fyctia par hasard, et j’ai décidé de participer à leur concours de ce début d’année 2023 : C’est un dix, MAIS… (New Romance) en soumettant The Dark Love (dispo chez fanfiction.fr aussi).
Il y a un peu d’entraide entre les auteurs, c’est nécessaire pour débloquer les chapitres enregistrés qui restent invisibles tant que la communauté ne s’active pas autour. On se lit donc les uns les autres, pour se soutenir, mais aussi pour se distraire.
Certaines histoires m’ont vraiment plu, et je devine à force de trainer sur ce forum, que certaines histoires pourraient correspondre aux goûts des uns et des autres ici , alors j’avais envie de venir vous en parler.
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Deux petites précisions : les chapitres sur Fyctia font entre 1000 et 7000 signes (ils sont donc très courts, je sais qu’il y a des aficionado des chapitres courts par ici ) et le concours actuel concerne la New Romance, donc ce genre est très largement surreprésenté dans les histoires ci-dessous.
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Ne sachant pas dans quel ordre vous les présenter, je vais déjà commencer par ma préférée :
Titre : Le sens des priorités
Auteur : Kalehu
Genre : romance, amitié, tranche-de-vie
Rating : M (16 ans et +)
État : 36 chapitres
Résumé : Lassée de se morfondre sur son canapé et de voir le regard de pitié de ses amis, Daisy décide de s’inscrire sur un site de rencontre, prête à essayer de retrouver son pouvoir de séduction. Tout se passe bien, jusqu’au moment où elle rencontre Nathanaël. Ce dernier va entrer dans sa vie pour bouleverser tout ce qu’elle croyait savoir sur l’amour. Il apparaît immédiatement comme étant l’homme idéal, mais Nathanaël cache en réalité des ambitions bien différentes de celles de Daisy. Et si le véritable amour était finalement différent de ce qu’elle avait imaginé ?
Avis : Pourquoi cette histoire est-elle ma préférée sur Fyctia ?
(Rq : j’ai dû lire une bonne vingtaine d’histoires en cours jusqu’à présent.)
D’abord, j’ai aimé l’héroïne et le cadre. Il ne s’agit pas d’une héroïne extraordinairement belle, intelligente, populaire… Elle ne va pas tomber dans les bras d’un riche patron de multinationale qui s’adonne au sadomasochisme, ni sur un champion mondial de hockey-sur-glace (en gros, les synopsis habituels sur Fyctia). Daisy est une étudiante lambda, décrite avec beaucoup de réalisme, et dont la personnalité est d’une crédibilité bluffante. Elle est dotée d’une intelligence simple et efficace que j’apprécie beaucoup. Ordinaire, lucide sur elle-même et sur les choses, fragile, elle tombe facilement dans la dépendance affective. La façon dont l’auteure décrit ses doutes et ses sentiments est efficace, c’est criant de réalisme.
Ensuite, l’histoire aborde la question des applications de rencontres, et là encore, c’est très bien rendu. En plus il y a de l’humour « banal ». Comprenez, on n’est pas dans une comédie française avec des gags improbables ou des répliques cinglantes, non, on est sur du slice-of-life commun avec toutes les anecdotes marrantes qu’on trouve sur VDM.fr ou qu’on se raconte le matin à la machine à café. C’est drôle et ordinaire à la fois. De fait, on se prend vite d’empathie pour l’héroïne et c’est immersif.
Si le début est consacré aux sites de rencontre, la suite est moins évidente. Le thème du concours imposé sous-entend qu’on doit avoir deux protagonistes qui sont amoureux (c’est une romance quoi), mais ne peuvent être ensemble pour X raison(s). Dans « Le sens des priorités », la raison c’est que l’homme parfait que rencontre Daisy ne veut pas d’une petite amie, mais une sexfriend (je précise d’ailleurs qu’il n’y a aucune scène de alors que c’est l’un des sujets essentiels, mais l’auteure est pudique). Et puis, à un moment, Kalehu nous fait comprendre que son synopsis est en réalité trompeur et qu’elle nous emmène dans une direction bien différente…
J’ai trouvé l’idée brillante. Un procédé déjà vu ailleurs, mais dans l’idée efficace et pour moi ça montre toute la qualité de plume de l’auteure, car son écriture ne contient aucune envolée lyrique. Ça se lit tout seul, c’est fluide, c’est simple, c’est de la tranche-de-vie avant d’être de la romance et moi ça me plaît.
Je dirais que le seul défaut de cette histoire c’est de donner des éléments clefs trop tôt dans l’intrigue. Je pense que Kalehu a voulu bien les doser, mais j’ai déjà deviné comment ça allait se terminer parce que justement le dosage est un peu maladroit (Oups, j’ai fait tomber le pot de sel dans la soupe. Bon je vais enlever le plus gros et dire que ce n’est jamais arrivé, les convives ne grilleront rien. Mouais… On n’est pas si bêtes que ça. ) Ça n’enlève rien à l’idée générale qui reste bonne.
Des histoires que j’ai lu dans le cadre du C’est un dix, MAIS… c’est sans doute la moins romantique de toutes, et pourtant ça reste ma préférée pour le message qui est véhiculé et pour le crédibilité de l’héroïne par rapport à toutes les autres.
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Titre : Tu ne sais pas que tu es belle.
Auteur : Pascal Gottesmann
Genre : romance, tranche-de-vie
Rating : M (16 ans et +) – sauf un chapitre en MA et sans doute un 2e un peu plus tard, mais de mon point de vue, le plus gros de l’histoire entrerait même dans du T (13 ans et +).
État : 32 chapitres
Résumé : Chloé, bientôt 28 ans, a un certain nombre de kilos en trop qui la complexent énormément. Pourtant, Alexia, sa meilleure amie aux allures de mannequin est certaine que, malgré ses formes, elle est capable de plaire. Yoann, jeune trentenaire assez immature et collègue de travail d’Alexia a toujours aimé les femmes rondes, sans doute parce que lui même se trouve trop mince. Lors de leur première rencontre, Yoann tombe immédiatement sous le charme de Chloé. Mais comment faire comprendre à cette jeune femme qui déteste son corps qu’elle a un charme fou ?
Avis : L’énorme force de cette histoire, c’est le sujet qui est traité derrière la romance : la grossophobie et les complexes des personnes obèses. Un sujet que l’on trouve de temps en temps dans les histoires, mais c’est la première fois que je lis des descriptions aussi parlantes de vérité sur le sujet. La personnalité de Chloé construite sur ses traumatismes et ses complexes est vraiment très très crédible.
Ensuite, les héros ne sont pas des canons et des figures emblématiques de romance (là encore, ça tranche avec le défilé des Apollon et Vénus des autres histoires). Elle, c’est une grosse (une vraie grosse, avec des bourrelets de partout et des seins qui tombent, pas une belle plante aux rondeurs sexy à la Meghan Trainor comme dans une autre histoire dont je parlerai plus loin). Lui, c’est un grand maigre à l’air hagard avec les oreilles décollées du roi Charles (comme il se décrit lui-même).
J’aime aussi beaucoup Alexia, la meilleure amie de Chloé, une espèce d’incarnation de super-héroïne et celle qui se bouge le plus dans l’histoire, quand les autres personnages auraient tendance à se complaire dans le fatalisme, la contemplation ou la dépression. Elle a aussi un petit côté machiavélique positif que j’adore.
Il y a aussi une dimension morale très forte et plutôt *feel good * qui moi m’énerve régulièrement, mais qui renoue avec la romance traditionnelle, avec des gentils qui gagnent toujours à la fin et des méchants qui sont punis pour leurs méfaits. Beaucoup ont l’air d’aimer cette histoire juste pour ça, parce qu’elle redonne de l’espoir aux gens dans un monde injuste et parfois cruel.
Le gros point négatif de cette histoire en revanche ce sont les dialogues, on dirait du vieux théâtre français, ou une série pour ménagères produite par France Télévision. Les personnages ne parlent pas de façon naturelle. C’est trop guindé, trop téléphoné, trop mécanique parfois, au point de tomber dans la rédaction d’élève de CM1. L’auteur (l’un des seuls hommes de la plateforme, je suppose que c’est sexiste de le souligner, mais je pense que c’est important de le dire, c’est rare et intéressant sur le plan sociologique) parle un peu comme ça dans ses commentaires. Il est très actif dans la communauté, toujours prêt à soutenir les autres auteurs, alors peut-être que je suis trop dure avec lui sur les dialogues. Surtout qu’il me rappelle un peu un ami à moi aussi dans sa façon de parler, je pense que ça influence sa manière d’écrire.