Conciliabules autour du vocabulaire

C’est de là que dérive l’adjectif « épistolaire » (qui explicite l’accent circonflexe sur le i de épître).

Nous le retrouvons plus particulièrement quand, au détour d’un cours, un professeur de français commence à parler de « roman épistolaire » comme si c’était un truc connu ! (De lui, oui !).

Il y a eu un Niveau 2 de Défi qui le proposait (Défi LA LETTRE), si vous Vous sentez de faire une fanfic sous forme d’échange de correspondance.


Puisqu’on est dans les traductions délicates, dans une branche voisine active ce jour, j’ai traduit un jour une fanfiction de ce type qui portait le titre de « pen pals ».

J’aurais dû la traduire « (Les) correspondants » puisqu’en français « potes de stylo » pourrait laisser perplexe.

Les correspondants sont généralement des gens qu’on ne connaît pas (mais à force, ça peut changer).

Comme les deux personnages qui s’écrivaient n’étaient pas des inconnus l’un pour l’autre et avaient des relations de type « ennemicales » (ce terme à été proposé sur le forum pour « frenemy »)…

…j’ai appelé la fic « Epistoleros ».

Forgé donc sur épître / épistolaire et pistoleros vu qu’ils se tiraient dessus à boulets rouges par courrier interposé.

C’était l’occasion d’utiliser un terme désuet, au sein d’un mot-valise avec un nom espagnol. Ça change et… c’est pile dans le ton. :stuck_out_tongue:

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Mes respects du matin, Monsieur le Compte !

Voilà une façon enjouée et déférente de saluer un noble personnage…
à condition qu’il soit comptable !

  • Car le nobliau survivant des épurations révolutionnaires de 1793, lui, s’écrit comte!
  • Même lorsque le dit comte est bon, hors de question de l’affubler de ce P qui le relègue au rang du commis caissier et de son boulier, chargé de dénombrer les ventes et compter les recettes. Voilà donc réglée la présence de ce P, ce compte cousin du comput, ancienne façon de dire comptage et qui a donné le computer américain. Et bien sûr, devant ce P, on met un M.
  • Mais alors, d’où vient au comte ce « M » incongru ?
    Des Mérovingiens ! Héritiers des usages du bas-empire romain dont les derniers empereurs s’entouraient de fonctionnaires qu’ils envoyaient en mission, les rois des Francs nommaient dans les grandes villes des représentants qu’ils investissaient de pouvoirs judiciaires, civils ou militaires. Il s’agissait des « Comites Palatii », les envoyés palatins (du palais du roi), qui ont donné « Comtes ».
  • Pour être honnête (pour une fois !) certains cas de déclinaison de l’ancien haut-français prenaient bien un p… selon l’humeur du rédacteur…
  • Cette même racine a également donné le commis (le jeune garçon que l’on commet à une tâche ou que l’on envoie faire des courses, ou bien l’avocat commis d’office, chargé d’une affaire), le commissaire (envoyé spécial de la république pour veiller à la fidélité des officiers en campagne), ainsi que le comité, réunion où l’autorité envoie son représentant.
  • Pour finir le tour des homonymes, il nous reste à mentionner le conte, celui des légendes ou des récits véridiques, selon l’usage. Avec une nuance, parfois, de mensonge ou de flatterie : s’en laisser conter, conter fleurette, etc.

Certaines portes sont mieux enfoncées que simplement ouvertes…

Sources ici et

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Puisque je suis Québécois, je me suis dit que ce pourrait être intéressant que je puisse vous partager un peu de ma culture, spécialement avec certains mots utilisés souvent ou quelques fois ici. En espérant pouvoir vous en faire découvrir de différents que les jurons fréquemment entendus.

Être évacher/ s’évacher

Se dit de quelqu’un qui est particulièrement mal assit, sans tenu, par paresse, par manque d’énergie ou pour se relaxer. C’est probablement un mot qui est un dérivé d’Avachir et Affaler, la définition du premier voulant dire : rendre mou quelque chose, et celle du second : se laisser tomber. Aussi, dans mon interprétation personnelle, ça peut aussi venir d’ Être vache.

Dans le langage populaire, souvent, une personne vache en est une qui est méchante, dure et déplaisante, l’une qu’on veut éviter. Par contre, au Québec, une personne vache peut aussi vouloir dire de quelqu’un qu’elle est paresseuse et sans énergie, à court ou moyen terme. Si une personne dit ; «Je me sens vache aujourd’hui.», c’est qu’elle n’a que peu de motivation à faire quoique ce soit :sweat_smile:. Pour les origines de cette expression, elle vient probablement des fermiers, comme beaucoup, mais je n’ai pas les références.

10 « J'aime »

Génial ! Je ne regarderai plus les gens vaches de la même façon ! Et là prochaine fois que je verrai un patient adopter une posture liquide sur un siège je lui dirai qu’il s’évache !

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Merci @Sasari !
ça veau le coup, ton avacher meuh plait beaucoup ! :cow:

7 « J'aime »

Aujourd’hui, j’ai découvert un mot (ou plutôt deux) qui m’ont laissée… sur les fesses. Littéralement. :sweat_smile: Il s’agit de la rumpologie, ou pygomancie, à savoir… l’art de lire l’avenir d’une personne par l’étude des caractéristiques de ses fesses et de son sillon interfessier. Non, vous ne rêvez pas, ça existe vraiment. Apparemment, la fesse gauche représente le passé, la fesse droite l’avenir. On se demande où se situe le présent, mais bon… :innocent:

Etymologie : pygos (fessier) et manteia (divilation)

Pour celles et ceux que ça intéresse, voici le lien Wiki : Rumpologie

7 « J'aime »

La grande question c’est comment es-tu tombé sur un truc pareil ? Non parce qu’on est pas encore dans les heures sombres de la nuit…

10 « J'aime »

Ce qui donne l’occasion de souligner la grecité de l’adjectif peut être un peu plus familier :
Callipyge : littéralement « à belles fesses »’ (se dit plus volontiers des statues antiques de Vénus diverses et variées).
.
On retrouve « kalli » dans le nom de la muse Calliope. Il semble que les avis divergent pour le sens de -ope.
C’est la Muse de l’éloquence, il y a une chance que ce soit dérivé de « epos » (voix) plutôt que de ops (visage).

7 « J'aime »

@LeslieGermStar : Euh… J’étais en train de relire le tome 2 de « Tu mourras moins bête mais tu mourras quand même », BD de vulgarisation scientifique qui me fait vraiment beaucoup rire (en plus de m’apprendre des choses). J’y ai d’ailleurs appris un autre mot, plus sérieux : l’apoptose. Il s’agit de la mort cellulaire programmée. (Voir cet article.)

@OldGirlNoraArlani : Très juste ! « calli » se retrouve aussi dans « calligraphie » (belle écriture) ou « calligramme » (poème qui forme un dessin)… Je ne savais pas pour Calliope, par contre. Et Callisto, alors, pour rester dans la mythologie ?

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Fou-rire du matin, merci beaucoup :joy:

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Si je ne dis pas de bêtises, Callisto signifie la même chose que Callista, à savoir « la plus belle » (modeste, comme prénom :thinking:)

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Dans une faille temporelle ? :stuck_out_tongue_winking_eye:

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Petit billet d’humeur morose

Le néologisme, la création ex nihilo de mots nouveaux, me parait le privilège des génies et des charlatans.

Les génies donnent un nom à leur invention. Le néologisme porte ici une idée nouvelle, un concept transmué, un élan créateur.

Les charlatans rhabillent un vieux pot dont ils ignorent le nom, le contenu et parfois jusqu’à l’existence antérieure.

Dans quelle catégorie classer ces personnages politiques qui fulminent des néologismes démontrant que leur exigence de plier le monde leur tient lieu de réflexion ?

Voilà, c’est fini, ça va beaucoup mieux ! :blush:

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Petit billet d’humeur taquine

On attribue à Sacha Guitry le dilemme intime et grammatical suivant :

« Je suis des plus satisfaits de ma femme. Faut-il mettre un s à satisfait ? La question se pose… »

EDIT : je ne peux faire que 3 posts à la suite…
donc j’enrichis celui-là !

Pour aujourd’hui, voici une vieillerie typiquement française :

Le Vaudeville

Boileau en fit l’éloge en ces termes :
D’un trait de ce poème, en bons mots si fertile,
Le Français, né malin, créa le vaudeville,
Agréable indiscret, qui, conduit par le chant,
Passe de bouche en bouche et s’accroît en marchant.

  • En musique, le vaudeville chemine, du 17ème au 18ème siècle, de la chanson à boire jusqu’au détournement des airs connus et populaires pour en faire des satires rimées d’individus ou d’événements du jour.
  • Au théâtre, le Vaudeville évolue de la petite comédie légère, entremêlée de ballets et chansons, pour devenir l’essentiel du divertissement parisien au 19ème siècle et se spécialiser dans les situations burlesques, les intrigues et qui-proquos, en particulier dans le triangle amoureux (Georges Feydau), la satire sociale (Georges Courteline) ou la comédie de mœurs (Eugène Labiche).

Mais d’où vient ce mot ?

  • Olivier Basselin était foulon-drapier au Val-de-Vire en Normandie au 15ème siècle : il assurait la finition des étoffes en les battant dans diverses substances.
    Mais il était aussi un poète populaire, à une époque où la province ne se sentait pas encore partie intégrante du royaume de France. Ce « Bon homme » adorait le manger, le cidre et le vin et composait des chansons à boire, alors que la mode de son temps était plutôt aux fabliaux et autres lais d’amour.
  • Ce genre typiquement normand est devenu célèbre sous le nom de Vaudevire. La Fresnaye, cité par Littré nous en donne preuve par la rime :
    Chantant en nos festins, ainsi les vaux de vire,
    Qui sentent le bon temps, nous font encore rire,
  • Aux 16ème et 17ème siècles, le nom s’altère en Vaudeville et s’enrichit d’une notion de satire ou de ragot, typique de la culture populaire française. Lacurne illustre cette évolution en citant :
    • Les « Recherches de la France » d’Etienne Pasquier : Il estimoit cette opinion n’estre fondée que sur un simple vaudeville [bruit de ville]
    • ou encore "Chansons vulgaires et voix de villes, les autres disent vaux de villes, Saint-Julien

Sources ici et .

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Je surkiffe cette information. Vraiment. J’ai cherché le gentilé de ce lieu, mais c’est assez décevant : les Virois et les Viroises…

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Eh mais c’est chez moi ça !
Pays de l’andouille, tout ça tout ça… Le cinéma de Vire s’appelle Le Basselin. (maintenant vous savez pourquoi et ça vous fait une belle jambe :laughing:)

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La ferme !

Voilà une injonction bien grossière et un mot bien trivial pour mériter quelques lignes dans cette section riche en raretés…

Voyons d’un peu plus près cet ordinaire rural.

  • Certes, la ferme est l’exploitation agricole qui jalonne nos campagnes. Le terme désigne aussi l’ensemble des terres, vergers et autres pâtures attenantes, ainsi que les corps de bâtiment, ou encore les personnes qui y résident, voire - chez Orwell seulement - l’ensemble des animaux. Jusque là rien de bien folichon.
  • Mais il s’agit là d’un sens généralisé, affaibli, d’un type bien précis de domaine agricole. Au moyen-âge, une ferme était d’abord une exploitation agricole louée par le seigneur à un tiers paysan. Le contrat d’affermage accordait la jouissance de l’exploitation au dit tiers, le fermier, pour une durée et un prix fixés.
    • Généralement la durée du bail était assez longue, pour inciter le fermier à entretenir les bâtiments et soigner les terres.
  • Mais pourquoi ce terme de « ferme » pour désigner un bien loué ?
    • Tout simplement parce que le prix était défini « ferme », c’est-à-dire fixe, s’affranchissant des aléas propres aux rendements agricoles.
  • D’autres biens ou moyens de production pouvaient faire l’objet d’un contrat d’affermage : des habitations ou des droits divers, tels que l’usage de chaises d’église.
  • Ce fut également le cas, sous l’Ancien Régime, lorsque le roi mettait à fermage la collecte des impôts. La levée de l’impôt était confiée à des tiers, souvent des sociétés privées, qui vérifiaient les bases d’imposition, effectuaient les tournées de collecte, les relances et le recouvrement.
    • L’avantage pour le monarque était de s’assurer un revenu immédiat et sûr, quitte à abandonner une part substantielle des revenus pour lesquels il eût du mandater force huissiers. Ces personnes à qui le roi « vendait » littéralement le revenu de l’impôt étaient appelés les fermiers généraux.
    • Sous Colbert, la France comptait “Cinq Grosses Fermes”, dont la valeur finit par atteindre un tiers des revenus de la Couronne :
      • les gabelles, impôts sur le sel,
      • l’octroi de Paris, taxes sur les denrées entrant à Paris, telles que l’huile, le sucre, le vin, etc.
      • les droits de traite (droits de douane entre provinces ou avec les états voisins)
      • la taxe sur la vente exclusive des tabacs, créée en 1674-1675 ;
      • le « domaine d’Occident » (impôts sur les denrées échangées avec la Nouvelle-France et les Antilles via la Compagnie des indes occidentales) créé en 1674-1675.
  • Le fermage laissait en pratique les pleins pouvoirs fiscaux et de police à ces particuliers collecteurs d’impôts, que l’imagerie populaire peignit comme de véritables sangsues qui sur-taxaient la population et réalisaient des bénéfices considérables. Il est vrai qu’au début du 18ème siècle, les 40 fermiers généraux ne laissaient plus qu’un tiers des revenus collectés au roi…
  • Très décrié par le peuple, ce système inique fut une des causes majeures de la Révolution française, dont les fermiers généraux furent parmi les premières victimes.

Source ici, , et .

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Eh bien celle-là, elle ne date donc pas d’hier ! Et pourtant, je n’ai pas l’impression qu’elle soit obsolète… :stuck_out_tongue:

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Et l’exclusivité non plus, n’a pas bougé d’un iota (régie nationale des tabacs et allumettes)…

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Aujourd’hui un mot qui sent la peur :

la coulrophobie

Il s’agit de la peur des clowns !
Il semblerait, nous dit René Girard, que cette peur soit liée à la fonction sociale des masques, qui remonte au-delà de la plus ancienne antiquité, à l’époque des sacrifices humains…

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