Il y a plein de films, animes et séries qui pourraient entrer dans cette catégorie mais les premières séries qui me viennent à l’esprit, c’est, dans des styles tout à fait différents, Community et the Knick.
Petites présentations des œuvres susmentionnées :
Community
Série comique de 2009 de Dan Harmon (qui est aussi connu en tant que co-créateur et scénariste de l’irrévérencieuse et très déjantée série d’animation Rick et Morty… qui est à l’origine une sorte de fanfiction parodique de Retour vers le Futur), elle a rencontré un relatif succès aux USA (malgré un humour de niche) mais a peiné à trouver son public en France où les dernières saisons n’ont même pas été doublées (ce qui m’a empêché de l’acheter en coffret collector alors que c’est clairement ma série -à égalité avec Kaamelott- d’humour favorite, gnarf) … c’est dire l’échec commercial.
Le pitch : Jeff Winger, un ténor du barreau est renvoyé après des années à travailler comme avocat avec un diplôme usurpé. Obligé d’intégrer une fac de seconde zone (« Community college » aux USA) pour finir de valider ses degrés universitaires et retrouver son boulot, il fait la connaissance de Britta (une fille canon, aimant monter au créneau pour défendre de « justes causes » et faisant partie de son cours d’espagnol) et Abed (un ovni dont les traits autistiques sont centrés sur sa passion pour les films et séries TV). Manipulateur patenté, Jeff crée un faux groupe de révision « d’espagnol » pour tenter de séduire Britta qui y a invité Abed… qui a lui même invité Shirley (une catho intégriste et mère célibataire, en reprise d’étude après que son mari l’ait trompée et quittée), Pierce (un vieux milliardaire excentrique et raciste), Troy (l’ancien quarterback un peu neuneu sur les bords) et Annie (Miss Je-sais-tout BCBG ayant connu une mauvaise passe au lycée qui lui a fait rater de justesse l’entrée dans une vraie fac). Après quelques péripéties où Jeff met volontairement la pagaille dans le groupe pour essayer de s’éclipser avec Britta pour un diner en amoureux, il use de son charme de gourou pour réconcilier tout le monde (toujours pour essayer de gagner les faveurs de Britta) et déclare que les membres hétéroclites du groupe sont maintenant une « communauté ». C’est le début d’une aventure rocambolesque de « six saisons et un film ».
La présentation que je viens de vous faire est extrêmement trompeuse (même si rigoureusement fidèle au contenu de l’épisode pilote) tant il échoue à restituer ce qu’il se passe dans cette série comique complétement décalée. Toujours inattendue, extrêmement culottée et parfois touchante, il est très dur de parler de Community et d’essayer de donner envie aux gens de la regarder, sans en dire trop. Quand bien même, je tenterai une description précise de son contenu que ce serait compliqué de lui rendre justice, tellement c’est barré et brillant. Je ne peux pas vous dire dans quelle direction va le scenario sans trop spoiler mais ce qui est sûr c’est que, contrairement à ce que laisse présager mon résumé et les premiers épisodes vous n’allez définitivement pas assister à la transformation de Jeff en un mec bien et cette série ne raconte absolument pas une histoire d’amour entre lui et Britta. Et c’est tant mieux !
Usine à répliques cultes, avec des personnes tous plus bêtes et clichés les uns que les autres mais au final attachants, cette série se révèle très bien scénarisée, spécialement innovante et est une pépite d’humour noir qui foisonne de références à la pop culture. La série se moque de tout et de tout le monde (surtout d’elle-même). En terme d’écriture, la première saison donne le ton (avec l’introduction de personnages secondaires truculents -l’inénarrable señor Chang et le Doyen- et quelques épisodes cultes, notamment le débat sur la bonté de l’humanité, la parodie des affranchis et le premier « match de paintball ») mais n’atteint pas encore le level mythique des saisons 2 et 3 dont chaque épisode est un incroyable bijou d’humour. Après une saison 4 en demi teinte (Dan Harmon avait été remercié… il est revenu en S5 suite à une pétition), la série a su reprendre son élan et proposer quelques autres épisodes mémorables. Malgré le départ d’une partie du casting principal, le pari/leitmotiv d’Abed (vrai personnage culte de la série) a été à son terme avec « six saisons et un film ». Le film toujours en préparation est annoncé pour 2026… soit plus de dix ans après la fin de diffusion de la sixième saison. Et perso, je l’attendrai avec enthousiasme et foi jusqu’en 2036 s’il le faut, parce que rarement une série aura été aussi « cool. Cool, cool, cool » et aura autant mérité un film.
Quelques extraits (pour ceux qui se fichent d’être spoilés):
Dans un tout autre registre, The Knick (c’est loin d’être tout public, il me semble que la majorité des épisodes était interdite - 16) :
The Knick est une grosse claque qui offre une plongée fascinante dans l’histoire de la médecine au début du XXe siècle. La série s’inspire assez librement de la vie de deux médecins ayant réellement existé (mais n’ayant pas réellement travailler ensemble, contrairement à leurs homologues de la série) : le Dr William Halsted (le Dr John Thackery, incarné par Clive Owen), un pionnier de l’asepsie et de l’anesthésie pour les procédures chirurgicales (concrètement il a été l’un des premiers à remarquer une baisse du taux de mortalité si des règles d’hygiène étaient appliquées en amont de l’opération) et le Dr Louis T. Wright (le Dr Algernon Edwards, incarné par Andre Holland), médecin afro-américain défenseur des droits civiques travaillant dans un hôpital de Harlem au début du XXème siècle. Cette série tisse habilement un cadre entre fiction et réalité en nous transportant au cœur du Knickerbocker (hôpital de New York pas vraiment non ségrégué) où la médecine moderne en était encore à ses balbutiements mais où les avancées de l’ingénieux mais tortueux Dr Thackery apportaient un vent de révolution.
Très crue (les scènes de chirurgie sont saisissantes et dures à regarder) mais jamais voyeuriste sans raison, la série nous peint une fresque historique captivante dans laquelle on assiste aux prémisses tumultueux de la chirurgie moderne sous fond de ségrégation raciale et de conflits sociaux. Le personnage génial et charismatique campé par Clive Owen, se perd sa quête de progrès médical en devenant un junkie (c’est un peu House, version réaliste et moins drôle) à force d’expérimenter sur lui même les effets anesthésiques de différents opiacées ; tandis que son homologue le calme et humaniste Dr Edwards a fort à faire pour prouver sa valeur en tant que médecin noir -et plus simplement en tant qu’être humain- dans le contexte des USA de 1900. Le racisme larvé entre Thackery et Edwards, au début de la série est traité avec beaucoup de justesse et d’intelligence.
La réalisation de Steven Soderbergh est magistrale et le casting principal bourré de talent. Le rendu est saisissant et la musique envoûtante : si la saison 1 est excellente, la saison 2 est un chef d’œuvre au niveau de la mise en scène et de la montée en force tragique de l’écriture, les deux derniers épisodes offrent un final en apothéose. Malgré sa qualité, la série est restée assez confidentielle : sans aucun doute une série sous-cotée et un chef-d’œuvre méconnu du petit écran !
Une très courte bande annonce de la saison 1 (j’ai eu du mal à trouver un trailer qui ne soit pas trop explicite): Mini trailer