Le passé du subjonctif

Voici une question un peu spéciale… En lisant des défis et des fanfics plus longues, je me rends compte que certains d’entre nous utilisent l’imparfait et le plus-que-parfait du subjonctif (pour qu’il arrivât, afin que je fusse épargné, ce genre de choses un peu étranges, quoi :sweat_smile:), d’autres jamais, et d’autres parfois mais pas toujours. (Je fais partie de cette dernière catégorie.)

Je rappelle la règle : normalement, après un verbe au passé, on ne peut pas mettre du subjonctif présent, il faut utiliser le subjonctif passé. On ne devrait pas écrire « Elle voulait qu’il l’embrasse », mais « Elle voulait qu’il l’embrassât »… D’où ma question : que faut-il faire ? Il y a des phrases où l’emploi du passé est vraiment bizarre, je trouve, alors que dans d’autres, ça passe tout seul. Pour moi, l’emploi de l’imparfait du subjonctif est essentiellement lié au point de vue que j’utilise : s’il s’agit d’un personnage très cultivé, ou guindé, ou les deux (en fait, les trois quarts des personnages que j’adore, quoi), j’utilise l’imparfait du subjonctif dans son point de vue plus que dans celui des autres personnages.

L’utilisez-vous ? Qu’en pensez-vous ? Est-ce un temps inapproprié pour des histoires écrites au XXIème siècle ? Y a-t-il au contraire un charme au passé du subjonctif ? Faut-il jongler entre présent et passé ? Y réfléchissez-vous lorsque vous écrivez ?

Je conclus avec « la complainte de l’imparfait du subjonctif » (auteur inconnu), pour ceux que ça amuse :

Ah ! Fallait-il que je naquisse
Que sous votre toit je grandisse
Et que près de vous je vieillisse
Pour que vous me détruisissiez ?
Fallait-il que je vous suivisse
Et qu’à vos lois je m’assouvisse
Pour que délaissé je me visse
Et qu’à l’écart vous me missiez ?

Bien qu’imparfait toujours je fusse
Fallait-il donc que je me tusse
Et qu’en tous lieux je ne parusse
Que pour que vous m’en exclussiez ?
Hélas ! Sans que je le voulusse
Fallait-il que je vous déplusse
Et qu’assez longtemps je vécusse
Pour que vous me méconnussiez ?

Fallait-il que je vous aimasse
Que pour vous je me dévouasse
Je soupirasse et m’enflammasse
Pour qu’enfin vous me glaçassiez ?
Faillait-il que je sanglotasse
Et qu’à vos pieds je me jetasse
Je m’attachasse et m’enchaînasse
Pour que vous me repoussassiez ?

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Je me rappelle déjà, sous Chirac (oh le vieux eh), qu’on parlait d’une disparition de l’imparfait du subjonctif.

En vérité, Il n’y a qu’une seule source sûre : L’imparfait du subjonctif | Académie française

Donc fais ce que tu veux, comme tu veux ! Dans les faits, l’imparfait semble privilégié en littérature. Mais tout dépend de ce qu’on écrit… J’irai pas le mettre dans un conte pour enfants. Ils ont assez de difficultés avec le reste.

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Pauvre imparfait du subjonctif :pleading_face:

Personnellement, je l’utilise assez facilement en ce moment, peut-être justement parce que je suis retournée au XIXème siècle le temps d’une histoire vampirique :thinking: Il m’arrive aussi de le caser de temps en temps dans d’autres récits, essentiellement des défis, d’ailleurs :thinking: Pour mon roman fantasy, en revanche, je ne suis plus certaine de l’avoir utilisé… il faudrait que je revérifie, tiens :thinking: Mais tu me donnes une jolie piste de changement à utiliser aussi entre les points de vue de mes différents personnages…
Parce que du coup, je ne sais pas si c’est inconscient du fait qu’il passe assez inaperçu tous les jours (surtout à l’oral : déjà le subjonctif présent s’en prend plein les dents alors le passé, hem…), mais j’associe assez facilement le subjonctif passé à des personnages très cultivés et/ou issus d’un certain milieu social (souvent la noblesse). J’ai du mal, par exemple, à imaginer une orpheline ayant grandi dans la rue au subjonctif passé :sweat_smile:
Par contre, à la narration à la troisième personne, ça ne me dérangerait pas du tout de l’utiliser pour une histoire qui se déroulerait au XXIème siècle. A la première personne, en revanche, ça ferait un peu bizarre… Mais comme la plupart de mes histoires se déroulent soit dans le passé, soit dans un autre monde, et que je n’utilise que très peu la première personne, je ne me mets pas de barrières : si ça fait joli, alors je le mets. Et le premier qui me dit que mon style est difficilement lisible à cause de ce mignon petit temps rejeté avec dédain, je lui fais bouffer un Bescherelle. (pardon pour cette violence, mais on m’a déjà reproché ça… pour du passé simple !)

Pour les règles exactes, je ne me souviens plus de tout malheureusement :pensive: par contre, ce dont je suis certaine, c’est que je ne remercie pas mes profs de français et instits qui ne m’en ont somme toute que très peu parlé (voire pas du tout ?), au grand dam de ma prof de latin de troisième qui pestait contre notre ignorance :pensive:

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Ah oui, je confirme !!! :grin: Ma question était d’ordre plus général : quels sont vos choix, et pourquoi choisir telle option plutôt que telle autre ? Ma position sur le sujet est assez tranchée : jamais à la 1ère personne (car je trouve ça trop bizarre) sauf circonstance exceptionnelle (quand je veux attirer l’attention sur cet emploi), parfois à la 3ème lors d’une focalisation sur un personnage plutôt cultivé et / ou guindé (mais jamais dans les dialogues). Des fois, je m’interroge pendant de longues minutes sur l’emploi du passé ou du présent. En fait, cette question vient d’une remarque de @ChiaraCadrich sur un de mes textes. Le passage incriminé était le suivant :

« Il n’eut ni le temps ni la présence d’esprit de l’arrêter, alors qu’il avait su avant même qu’elle n’achève sa phrase ce qui risquait de se produire. »

Chiara me demandait pourquoi je n’avais pas écrit « avant même qu’elle n’eût achevé sa phrase »… Et j’étais bien en peine de répondre. Après plusieurs relectures de cette phrase (oui je sais je chipote), je crois que c’est parce que ça ferait trop de verbes « avoir » dans la phrase (soit en verbe, soit en auxiliaire) et deux temps composés différents qui s’enchaînent, chose que je n’aime pas trop. Bref, je trouvais que ça aurait alourdi ma phrase, alors que le point de vue de Giles (érudit et relativement guindé) l’aurait justifié. Et même maintenant, j’hésite encore en me relisant… :sweat_smile: La concordance des temps, c’est terrible.

Ah oui, je comprends très bien. J’ai écrit toute une histoire de Sherlock Holmes (dans le fandom non de la série mais des récits de Conan Doyle) et j’ai utilisé l’imparfait du subjonctif quasiment partout malgré l’emploi de la 1ère personne (puisque c’est Watson qui raconte). Ah tiens, je n’ai pas posté cette histoire ici… :thinking: Bon, je vais y remédier…

Tout pareil. Et quand l’histoire se passe à un siècle antérieur au XXème, c’est beaucoup plus facile !

Ne lui jette pas la pierre… C’est difficile d’aborder le sujet quand la moitié des élèves trouve qu’en effet, le passé simple, c’est trop difficile pour eux (et même le présent d’ailleurs - cela dit, c’est vraiment un temps difficile car il y a beaucoup d’exceptions) ! :sob:

La règle de l’emploi du passé du subjonctif est assez simple :

  • le verbe d’une proposition principale est au passé ou au conditionnel : la proposition subordonnée est au subjonctif passé. Exemple : Elle craignait (passé) qu’il ne cherchât à l’embobiner. Il faudrait (conditionnel) qu’elle fût bien stupide pour se laisser faire !
  • le verbe d’une proposition principale est au présent : la proposition subordonnée est au subjonctif présent. Exemple : Elle craint qu’il ne cherche à l’embobiner.
  • le conditionnel passé peut être, dans certains cas, remplacé par le subjonctif plus-que-parfait (j’avoue, c’est ce que je préfère). Exemple : « Il aurait fallu qu’il le fît » peut être remplacé par « Il eût fallu qu’il le fît » ou « Encore eût-il fallu qu’il le fît » (ce que je trouve assez classe)…

Mais ça, c’était avant ! Car comme il est précisé dans l’article envoyé par @fulmineo, depuis les années 70, on accepte le subjonctif présent partout et il est devenu la nouvelle norme. L’imparfait du subjonctif n’est plus guère employé que dans la littérature (et ce de moins en moins).

En latin, la concordance des temps est obligatoire, tout comme en espagnol d’ailleurs (ça commence à disparaître un peu mais l’imparfait du subjonctif est encore très utilisé, comme après « como si » : « como si fuera »…), donc il est normal que râlent les profs de latin !!! :roll_eyes:

(OK c’est un peu long… Désolée.)

EDIT : Comme on est partis sur autre chose avec @fulmineo, j’ai coupé le sujet en deux…

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4 messages ont été scindés en un nouveau sujet : Un problème concret d’utilisation du subjonctif passé

Hello there! :wave:

Je crois que tu l’auras remarqué en me lisant un peu, Alresha, mais j’adore le subjonctif passé (même si je suis sûre de ne pas l’utiliser correctement dans 50% des cas :laughing:) !

C’est venu d’une réflexion d’une amie (poke Lutias) qui m’avait alors expliqué la magie de la concordance des temps, et qu’en théorie, un récit au passé appelle un subjonctif au passé. Après moult tentatives à en faire grimacer la prof de français en toi, je pense que maintenant je maîtrise mes conjugaisons… mais je galère encore avec les subtilités et les situations où on doit/peut ou non l’utiliser… :sweat_smile:

Par défaut, je l’utilise partout, parce que oui, mon récit est au passé, alors pourquoi je mettrais du subjonctif présent ? Mais j’ai déjà rencontré des cas de figure où le subjonctif présent était plus adapté.
Je n’ai pas d’extrait précis en tête, mais pour donner un contexte, on a une introspection du personnage vis-à-vis d’un événement, et soudain, une interjection ou une réflexion qui, en temps normal, appellerait du subjonctif présent. Du style « qu’il aille au diable ! », par exemple. Et ça me fait aussi bizarre d’écrire « qu’il allât au diable ! » autant que la version au présent… :sweat_smile:
Donc, dans ces moments-là, je fuis, je tourne autrement, ou j’utilise la magie de l’italique pour transcrire directement la pensée du personnage plutôt que de le signifier dans la narration…

Mais j’ai déjà lu bon nombre d’œuvres (surtout traduites) où le passé du subjonctif était utilisé, mais pas systématiquement. Je pense aux Désastreuses aventures des orphelins Baudelaire, plusieurs œuvres de Ranpo, ou encore dans Le Sorceleur si je ne dis pas de bêtises.
À mon avis, ça marque davantage l’antériorité dans le récit, même s’il est au passé simple. Je sais pas si j’arrive à être claire, mais en mettant du subjonctif présent avec la narration au passé, on est davantage dans l’action du récit, et utiliser ponctuellement le subjonctif passé souligne encore mieux l’antériorité du verbe au subjonctif…

Je ne fais pas du tout attention au point de vue du/des personnage.s sur le(s)quel(s) la narration se focalise… Mais maintenant que tu le dis, c’est vrai que ça fait un peu bizarre d’avoir des gens « lambdas » (et pas cultivés, littéraires ou autre) avoir des pensées au subjonctif passé ! :laughing:
Je me souviens de mon premier défi du forum, où j’avais fait utiliser le subjonctif passé au personnage qui racontait son petit monologue à un autre. Beaucoup de vos retours soulignaient le côté très littéraire d’un personnage qui, pourtant, devrait plus avoir une allure de bourrin rustre pas éduqué :laughing: (je grossis le trait)

Mais c’est vrai que chez Ranpo (qui est l’auteur que je lis(ais) le plus), qui raconte très souvent l’histoire à la 1e personne, des fois en se mettant lui-même en scène et des fois non, est régulièrement traduit au passé simple avec l’utilisation ponctuelle (parfois systématique) du subjonctif passé. Et oui, se dégage alors du texte (qui date de la 1e moitié du XXe pour mes références) une impression d’éducation, de sensibilité littéraire… qu’on ne trouverait alors pas dans un récit mettant en scène un collégien/lycéen, par exemple.

Personnellement, je me trouve davantage impliquée dans une histoire utilisant (bien) le subjonctif passé – surtout quand la langue source est le français. Parce que, comme le souligne Fah, c’est un temps méprisé, ignoré, et très méconnu, alors que bon, il est savoureux à la lecture ! :innocent:
Bon, par contre oui, il y a des limites. Le passé du subjonctif à la 1e personne, c’est un gros non, à moins d’avoir réellement un personnage littéraire, et « mûr ». Je veux dire, si vous me racontez l’histoire de Martin Dupont, lycéen féru de littérature, je doute que je le reconnaîtrais en tant que lycéen s’il utilise le subjonctif passé. Mais si c’est au contraire un grand auteur de renom, qui baigne dans les collections de la Pléiade et autres trucs prestigieux, là, bizarrement, j’arriverais à le trouver davantage vraisemblable ! :stuck_out_tongue:

Et j’adresse une petite pensée à mon directeur de mémoire qui utilisait tranquillement du subjonctif passé à l’oral pendant nos rendez-vous sur mon travail… :laughing: Ça fait toujours bizarre, mais ça me manque beaucoup, tiens ! :stuck_out_tongue:

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J’ai très envie de répondre aux deux sujets (merci Alresha :grinning: ) car j’adore moi aussi le subjonctif passé, mais ça ne sera pas pour tout de suite. Juste dire que ça m’arrive aussi de l’utiliser à l’oral quand il le faut, et peu me chaut que l’on me regarde comme un OVNI, je ne peux pas zapper son emploi quand c’est nécessaire, à l’oral comme à l’écrit, à moins que j’en loupe deux ou trois quelque part :upside_down_face: . Pour citer Karadoc : « Le subjonctif passé, c’est la vie. » (Oui, oui, il a vraiment dit ça, on ne dirait pas mais c’est un fin lettré, ce Karadoc.)

En attendant, je suis d’accord avec Alresha sur un autre point : je trouve moi aussi que la concordance des temps peut être infernale quand on écrit. Absolument essentiel, mais à se faire une entorse aux neurones, souvent. :exploding_head:

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J’aime beaucoup le charme désuet du subjonctif passé et je le saupoudre volontiers dans mes textes, même si j’utilise ponctuellement le participe present quand ca sonne trop inconfortable a mon oreille :slight_smile:

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Ahahah, non, je n’avais pas du tout remarqué ! :innocent: Et tu l’utilises bien (du moins je n’ai pas remarqué d’horrible erreur d’emploi) !

Petit cours de français express : ça s’appelle du style indirect libre. On met aux temps du dialogue un court extrait de la narration pour entrer dans les pensées du personnage… et ça permet d’éviter les « qu’il allât » et autres bizarreries du même style. (Même pas besoin de mettre en italiques…)

Ca ne m’a pas marqué mais c’est bien possible (j’en suis au tome 5). Globalement, les auteurs antérieurs à 1940 l’utilisent quasiment systématiquement. Après, c’est moins net…

C’est un peu cliché mais je trouve qu’il est bon que le style reflète en partie le point de vue du personnage et donc en partie son éducation, son caractère…

… … … J’essaye d’imaginer… :thinking:

Ah non mais j’adore, je trouve ça génial !

Tu veux dire dans la partie sporadique, parce que c’est un objet redondant ? :sweat_smile:

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Ah ça je n’en sais rien, mais bonne question ! Pour connaître la réponse, il t’eût fallu le demander à Karadoc et Perceval directement, afin que tout doute fût levé.

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Je vous lis et j’ai l’impression non moralisatrice qu’on est dans l’imparfait du subjectif. :stuck_out_tongue:

Je dis non moralisatrice car je pratique le subjonctif présent dans la mesure où je n’ai rien, en termes de texte et contexte, qui justifie l’emploi d’un temps qui apparaît vieilli et « ampoulé ».

Comme d’autres l’ont dit : la culture du personnage est importante, celle du narrateur aussi et j’ose dire celle du lecteur également… :sweat_smile:

Pour l’usage d’un subjonctif passé, quel qu’il fût / soit, je suis hélas dans une demarche simpliste qui consiste à me demander l’impression qu’il me fait. Si ça sonne trop bizarre ou parfaitement ridicule, exit !

90% du temps je dois vérifier quel est le temps exact (et comme il s’appelle), et s’il y a un circonflexe. Aussi suis-je moi aussi dans une optique « virons ces verbes, mettons des noms communs à la place » !

Ex : bien qu’il fût venu tardivement, il trouva encore une place… → malgré sa venue tardive / en dépit de son retard… / abandonnant toute ponctualité, il pria pour trouver une place et fut exaucé… :smile:

Je ne me laisse pas freiner par un verbe…
J’aime aussi flinguer impitoyablement, de la même manière les « malgré le fait que » + verbe hasardeux qui fait trop de mots. Simplement pour fluidifier la lecture (mentale ou … orale).

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Magnifique !!!

J’ai tendance à le faire aussi, mais de façon moins drastique que toi ! :sweat_smile:

Oui, c’est intéressant. Je ne sais plus qui m’a dit un jour que le français était une langue de noms et non de verbes (contrairement à l’anglais). Et c’est vrai qu’il est souvent plus commode de tourner la phrase avec un petit groupe nominal bien senti plutôt qu’une longue proposition compliquée et alambiquée (euh, ça ne m’empêche pas de faire souvent des propositions alambiquées, hein :roll_eyes:).

Ah oui moi aussi. Je crois que c’est même systématique.

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Aïe, le sujet qui fait mal… et que je maîtrise tout aussi mal.
Je ne suis pas suffisamment au fait des règles et des usages en la matière pour manier cet outil avec le dextérité nécessaire pour éviter tout accident. C’est mon oreille qui me dit quand utiliser le passé du subjonctif, ainsi que les échos des écrits que j’ai lus et qui l’ont employé.
Mais c’est hasardeux et, en me relisant, je constate que je déroge à mes propres règles, en utilisant parfois un autre temps dans des circonstances à priori similaires.
Bref, voilà bien une chose avec laquelle je ne suis pas parfaitement à l’aise, mais qui, je trouve, peut donner du corps au récit, comme un surcroît de ciment pour bien faire tenir l’édifice.
A contrario, c’est un temps lourd, voire éculé, et il n’est pas certain qu’il soit très digeste pour la plupart d’entre nous :sweat_smile:

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De grâce, ne jetons pas trop vite les dentelles et les cols droits de la langue de jadis !
Certes, c’est éculé, vieillot… passé ?

Mais notre escarcelle n’est jamais trop riche pour y puiser de quoi trousser les répliques qui font mouche !

Camper l’âme de nos personnages, brosser l’humeur d’un moment ou tisser l’ambiance d’un décor, pour tout cela, il nous faut maîtriser… la variété des effets, la palette des nuances !

Les crinolines légères du subjontif peuvent encore nous servir…
mettons, à orner les délicatesses d’un vieux beau en mal de séduction
ou alors, à dorer les fioritures d’un théâtre poussiéreux.

Ou, au contraire, les lourdeurs empesées de ce même subjonctif peuvent encore grimer la rigueur bornée d’un tuteur tatillon,
ou encore dépeindre les assertions rigides d’une supérieure honnie…

Je répugne à jeter notre grammaire parce qu’elle parait compliquée ! En fait, elle est assez logique, mais elle est trop riche (12 temps !) pour un usage courant (où 3 pourraient suffire).

Mais justement, nous n’écrivons pas toujours du « courant » !
Assouplir la concordance, oui, mais alors, au service d’un effet, d’une expressivité.
Encore faut-il connaître ce subjonctif… pour choisir de le maintenir ou de l’assouplir…

Bon allez, j’arrète de faire le vieux c…
En guise d’ode à la variété, je ne résiste pas à la tentation de citer cet opus d’Alphonse Allais, en écho au poème cité par Alresha :

Oui, dès l’instant que je vous vis,
Beauté féroce, vous me plûtes ;
De l’amour qu’en vos yeux je pris,
Sur-le-champ vous vous aperçûtes ;
Mais de quel air froid vous reçûtes
Tous les soins que pour vous je pris !
Combien de soupirs je rendis !
De quelle cruauté vous fûtes !
Et quel profond dédain vous eûtes
Pour les vœux que je vous offris !
En vain je priai, je gémis :
Dans votre dureté vous sûtes
Mépriser tout ce que je fis.
Même un jour je vous écrivis
Un billet tendre que vous lûtes,
Et je ne sais comment vous pûtes
De sang-froid voir ce que j’y mis.
Ah! fallait-il que je vous visse,
Fallait-il que vous me plussiez,
Qu’ingénument je vous le disse,
Qu’avec orgueil vous vous tussiez !
Fallait-il que je vous aimasse,
Que vous me désespérassiez,
Et qu’en vain je m’opiniâtrasse,
Et que je vous idolâtrasse
Pour que vous m’assassinassiez !

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@ChiaraCadrich j’adore :smiling_face_with_three_hearts:

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@ChiaraCadrich Tu me donnes envie d’aller jeter un oeil à tes fics avec tes métaphores aussi soignées :heart_eyes_cat: Tu joues autant avec la langue quand tu écris ou tu t’amusais juste avec le sujet ici ?

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Merci, @cokkarius et @Fahliilyol !

Ah ben non, c’est tout le temps, sinon ça vaut pas !

Il eût fallu beau voir, qu’on ne se fût point astreint aux arcanes dont on défend les beautés !

Mais Alresha et Oldie ont raison : un groupe nominal bien taillé fait souvent mieux l’affaire…

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Je le reprends tout de suite pour le travailler avec mes élèves la semaine prochaine, merci beaucoup !!! Je l’avais déjà lu quelque part, ce poème d’Allais, mais il m’était sorti de la tête.

C’est tout le temps, je confirme. Ce qu’écrit Chiara, c’est juste beau. Le fandom s’y prête bien.

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