Moi j’avais lu un article fort similaire… sur le Figaro.
Je suis d’accord avec Angel-Dust, il y a une furieuse tendance naturelle au clivage, à marquer les différences pour signaler l’appartenance à un groupe dans ce qu’il a de spécifique qui le distingue.
Mais dire « tout n’est que clivage » c’est évacuer la réponse à la question « d’accord mais sur l’orthographe ? Elle clive ou pas ? »
.
Dans le monde professionnel où je gravite, ce ne sont pas que les journalistes qui ne devraient pas faire de fautes (et ils en font !), mais l’intégralité des gens qui écrivent des mails, peu importe leur fonction ou le service dans lequel ils travaillent…
Si on envoie un mail avec une grosse faute (imaginez deux fautes ou plusieurs), on sera vite jugé comme un « prolo » à peine éduqué. Mais encore une fois, il faut voir le milieu où ça se passe et dont on comprendrait mal le manque d’exemplarité. Un grand quotidien pas capable d’aligner deux phrases correctes serait entièrement décrédibilisé.
.
.
Je ne participe d’ordinaire aucunement aux discussions sur la simplification de l’orthographe, sur l’injection de considérations politiques et sociales dans la grammaire, la conjugaison, le vocabulaire.
La raison en est simple et psychologique. Comme quelques autres (mais peu, apparemment) je me suis structurée avec le langage en tant que personne. Le français fait désormais partie de mon identité.
Il n’est pas pour moi un qu’un simple outil, que je pourrais changer ou abandonner parce qu’un autre conviendrait mieux.
Pour moi, c’est une fondation, un socle sur lequel je me suis construite. Et on n’abat pas les murs porteurs sans faire s’écrouler le tout. Toute personne qui arrive, persuadée de son bon droit et de sa juste cause à défendre, en essayant d’y aller à coup de masse pour faire la révolution… ne sera pas bien accueillie.
C’est une question d’auto-préservation. Je suis le français. Or tu critiques le français, donc tu me critiques moi… Tout ça c’est à un niveau viscéral, ça n’a rien d’une posture rationnelle.
.
.
Mais il y a un autre problème, que je ne peux étayer, qui n’est pas d’ordre purement culturel ou élitiste pour trier les gens.
Il est philosophique.
C’est que quand on ne comprend pas sa langue maternelle, ni ses rouages (grammaire, orthographe), et qu’on juge cette compréhension dispensable, on s’aveugle sur les conséquences et l’impact que cela peut avoir sur sa capacité propre à manipuler des concepts complexes et formuler des idées claires.
Quand ça nous manque, au bout du compte, on restreint sa compréhension du monde à la hauteur de ce qu’on est capable de saisir et de dire. La langue sert à communiquer, certes, parfois, mais elle sert aussi à appréhender et décrire la réalité dans laquelle on vit.
Que se passe-t-il quand on ne sait pas le faire ? On remet sa capacité de penser dans les mains d’autres personnes qui par leur éloquence, nous convainquent à leur guise d’agir exactement dans le sens qu’elles veulent.
L’éloquence est une arme redoutable dont on sous-estime largement la puissance. Elle n’arrive pas par miracle ou comme si elle était un don divin. J’imagine bien qu’il a fallu s’astreindre à apprendre des règles de français.
Mais s’astreindre est un verbe supposant un devoir et de la pénibilité. Inculquer aussi (saviez-vous que le verbe dérive du latin et signifiait enfoncer à coup de talon ?).
Il y a une autre voie.
Faire l’amour au français, pas la guerre. 
Et si vous écrivez « aux Français », rien qu’avec deux lettres et une majuscule, ça change quand même pas mal le sens de la phrase.