L’idée d’utiliser des mots plus rares et ne faisant pas partie de notre vocabulaire habituel a fleuri lors du Défi sur la Forêt (où nous avons même donné des liens).
Beaucoup se sont enthousiasmés de l’exercice et à l’idée d’enrichir le leur, de temps à autre.
Alors, je vous propose d’ouvrir cette branche pour y mettre de temps en temps un mot de vocabulaire qui vous semble beau, ou que vous venez de découvrir et qui vous enchante.
Chaque lecteur de la rubrique pourra ainsi fouiner et découvrir le mot et sa signification (oui il faut la mettre, quand même). Et l’utiliser à convenance s’il lui plait.
Si vous en avez plusieurs, gardez-les sous le coude, pour pouvoir les égrener de temps à autre quand l’activité du forum vous semble un peu ralentie.
Peut-être plus un coup de coude.
Je me doute que tu pourrais en avoir plusieurs, mais tu n’es pas la seule. Je sais de source sûre que plusieurs personnes sont intéressées par un tel sujet et vont rappliquer.
Aujourd’hui, mon mot est :
spécieux (féminin : spécieuse). qui séduit par de belles apparences faisant illusion. Destiné à tromper, induire en erreur, en reposant sur un mensonge.
Alors c’est parti. Les sources d’Oldgirl sont sûres…
Je vais endosser - dans cette rubrique comme dans tant d’autres, diront les plus taquins - le rôle du vieillard nostalgique, en rapportant quelques vieux mots, qui survivent sous la forme de rejetons inattendus.
J’ai déjà cité « despolier » alors autant commencer par là, plus correctement.
Bien sûr « despolier » s’est ajusté en « dépouiller » - délester de ses poux, et par extension, de toutes ses possessions les plus intimes.
Mais « despolier » a également donné « spolier » - priver quelqu’un d’un bien ou d’un droit - et son cousin d’outre-manche « spoil », où le sens s’est spécialisé dans la privation d’une jouissance -His bad mood spoiled the day : sa mauvaise humeur a gâché la journée - ou de l’innocence - a spoiled child : un enfant gâté.
Haha, j’adore ce genre de topic, ça permet d’enrichir son vocabulaire tout en s’amusant !
Juste, une petite question, il faut nécessairement que ce soit un mot de la langue française ? S’il n’a pas été « absorbé » dans notre langue, c’est interdit ? (parce que sinon je peux sortir bon nombre de mots nippons très poétiques)
J’avais découvert quelques mots avec le défi de novembre grâce au site qui avait été suggéré pour en trouver.
Lors de l’écriture de ma dernière fic achevée, j’étais retombée sur ce site, et j’ai découvert le mot « nitescence » ou bien sa version adjectivale « nitescent(e) ».
Nitescence : lueur, éclat.
« Elle irradiait une sorte de nitescence langoureuse qui faisait tourner les têtes. »
« La nitescence que donnent au teint l’air pur des montagnes et le reflet des neiges… »
Nitescent : lumineux, éclatant.
« La beauté nitescente de Calixte, marchant dans l’éclat solaire d’un jour d’été. »
Je l’ai trouvé très joli à l’oreille, et l’orthographe aussi m’a beaucoup plu. Je pense que mon attachement à ce mot vient de l’attachement que j’ai pour cette fic, mais il me réchauffe le coeur, pour une raison un peu indéterminée.
J’avoue que j’aurais aimé trouver l’origine étymologique de ce mot, mais pour le moment je n’ai rien à ce sujet. J’aimerais aussi savoir s’il existe un équivalent en japonais histoire d’avoir un vocabulaire vachement plus classe, mais c’est peine perdue aussi.
J’aime beaucoup ce mot. La sonorité me fait penser à la nuit, au croissant lunaire…
A propos d’étymologie, je n’ai pas trouvé source plus riche que le CNRTL. Pour nitescence, ce site annonce un emprunt savant du lat. nitescens, -entis, participe présent de nitescere « devenir luisant, se mettre à briller », en vogue au 19ème siècle. Source
J’imagine que tu auras du mal à établir quelques ponts étymologiques entre le français et le japonais…
Chevalier caliborgnon
A la bedaine replète
Juché à califourchon
D’haridelle maigrelette
Allongeait force horions
Assénait à l’aveuglette
Absorbé en dévotions
Ebloui d’une amourette.
Afin de pouvoir échanger sur une langue commune au plus grand nombre, je préfère qu’il s’agisse de mots de français.
Par contre, si ce mot a une origine étrangère, mais a été incorporé dans la langue française – de préférence avec une adaptation et une modification, plutôt que tel quel sans changement – alors je n’y vois pas d’inconvénient.
Ex : le marasquin (alcool de cerises amères, dont le nom vient de l’italien maraschino – prononcé Kino à la fin – et lui-même importé de Croatie…)
J’aime beaucoup le côté désuet d’ outrecuidance et aussi la façon dont il sonne - présomption, confiance en soi-même excessive ou arrogante; attitude qui en résulte vis-à-vis d’autrui.
Quand tu places ce mot dans un dialogue, cela situe déjà un peu le personnage…
De manière générale, j’ai un faible pour les « ence » et « ance », comme un souffle dans une phrase…
iridescence, par exemple - qui brille avec des reflets irisés.
Je viens de tomber sur ce couple vicieux. Ceux-là ne sont pas particulièrement beaux, mais leur homophonie trompeuse mérite d’y regarder de plus près :
Les prémisses - féminin pluriel - désignent les hypothèses d’un raisonnement logique. Exemple :
Les auteurs de fanfictions sont des gens formidables.
Vous écrivez des fanfictions
Donc vous êtes formidable !
Les prémices - féminin pluriel aussi ! - désignent le commencement d’un événement, l’avant-goût d’une réalisation. Exemples :
Les anciens offraient aux dieux les prémices de la récolte.
Ses regards perdus dans le lointain furent les prémices de son désamour.
Oh mon Dieu j’adore cette discussion !!! @ChiaraCadrich : ton poème sur le chevalier caliborgnon est extraordinaire !
A propos des prémisses / prémices : lors de vacances dans la magnifique île de Guernesey, où Victor Hugo a été exilé et où l’anglais cohabite avec un français parfois insolite, nous avons trouvé à plusieurs reprises des panneaux indiquant « ces prémisses sont terre à l’amende ». Après nous être dûment renseignés, nous avons appris que cela signifiait plus ou moins « stationnement interdit ». Le rapport avec les prémisses et les prémices me laissent encore perplexes, onze ans plus tard…
Sinon, le mot du jour (qui n’est pas spécialement beau, mais que j’aime pour sa sonorité amusante et la réalité à laquelle il renvoie, qui m’a toujours laissée perplexe car je n’ose imaginer la complexité du procédé) :
Boustrophédon : type d’écriture archaïque (utilisée notamment par les Grecs) qui se lit de gauche à droite, puis de droite à gauche. Le mot provient du grec « bous » (bœuf) et « strophè » (action de tourner) : littéralement, il signifie « qui tourne d’une ligne à l’autre comme le bœuf traçant un sillon dans un champ ». (Sérieusement, vous vous imaginez lire dans un sens, puis dans l’autre ???)
Le Ricardo ronronne pour son extraordinaire poème…
Voilà qui est très étrange… J’ai donc cherché un peu.
Il semble que les prémisses, comme argument d’un raisonnement, se soient souvent trouvées utilisées dans des testaments ou des actes juridiques. Ayant pris le sens de « sujet cité précédemment » (aujourd’hui on dirait « en objet », j’imagine), prémisses se serait donc spécialisé pour désigner un « terrain » ou un « bâtiment », thème très fréquent de ce genre de document. D’où la signification « d’emplacement » dans la langue du 14ème siècle, dont les locutions juridiques des îles anglo-normandes conservent l’écho.
Et bien sûr, l’anglais moderne a conservé ce glissement / spécialisation « premises ».
Ex. « Bread is cooked on the premises - on cuit le pain sur place. »
Alternance dans le sens de lecture des lignes successives, ou ligne que l’on peut lire dans les deux sens ?
Dans les deux sens, mais sans signifier la même chose, comme le palindrome ?
Non, non, pas palindrome ! Imaginez plutôt quelque chose comme ça :
Maître Corbeau, sur un arbre perché,
.egamorf nu ceb nos ne tianeT
Maître Renard, par l’odeur alléché,
: egagnal ec sèrp uep à tnit iuL
Etc, etc…
…cte ,ctE
Et MERCI pour l’explication sur les prémisses de Guernesey !!!
Je vois… Genre la flemme de revenir à la ligne !
Et de rien pour Guernesey.
J’adore cet endroit ! Le seul ou les british parlent encore français… Délectable.
C’était d’ailleurs un système d’écriture très répandu dans les premières civilisations possédant l’écrit. Instinctivement, l’humain va écrire/lire dans ce sens-là.
C’est vrai qu’aujourd’hui c’est plutôt rare puisqu’en apprenant à lire et à écrire on va aussi apprendre à suivre toujours un retour à la ligne (ou la colonne, cf écriture chinoise), mais je peux confirmer que ça arrive à certaines personnes d’écrire instinctivement en boustrophédon.
C’est justement ce qui m’est arrivé étant plus jeune, lors d’une réunion parents profs à l’issue de laquelle on a décidé de me faire sauter le CP, l’enseignante m’avait donné des étiquettes de 1 à 100 en me demandant de les coller dans l’ordre sur une feuille (pour m’occuper). Lorsqu’elle eut fini de discuter avec ma mère, elle a constaté avec consternation que j’avais rangé en boustrophédon On ne m’avait jamais appris la règle du retour à la ligne, pour moi ça semblait logique !
Trêve de racontage de vie, passons au partage de mots !
Un que j’aime beaucoup est anomie.
anomie : état d’une société caractérisée par une désintégration des normes qui règlent la conduite des hommes et assurent l’ordre social.
Je n’ai pas fait de sociologie, seulement un peu d’anthropologie, mais j’ai découvert ce mot grâce à mon artiste japonais préféré. L’une de ses chansons (Anomie) traitant justement d’une « société » où tous les repères sont brouillés, ce mot sert bien de titre à ladite chanson !
Sinon, bien que hors sujet, je voulais vous partager tout de même un de mes mots non francophones préférés : komorebi. Écrit 木漏れ日 en caractères japonais, ce mot désigne les rayons de soleil filtrant à travers l’épais feuillage des arbres.
Et mon deuxième mot préféré, évidemment japonais lui aussi, tsundoku (積読), qui désigne l’habitude d’empiler les livres sans jamais les lire, ce qui est, je l’avoue un de mes passe-temps favoris malheureusement.
Il se trouve que Tolkien a commencé ses romans en inventant des langues (elfiques surtout). En sindarin, la langue des elfes gris, il y a au moins une douzaine de termes différents pour désigner la lumière, selon sa provenance ou sa « texture ». Dans l’univers de la Terre du Milieu, belle part est faite aux étoiles, première source lumineuse de l’univers. Puis viennent le soleil et la lune, mais ces deux astres sont les fruits de deux arbres magiques qui poussaient au pays des dieux. Il y a donc des termes pour désigner la lumière de chacun des arbres.
Je n’ai jamais rencontré d’indices quant à une inspiration japonaise du Professeur, mais ce cousinage méritait quelques lignes.
Il était linguiste à l’origine, je me trompe ?
Il a dû se renseigner sur des travaux menés sur les diverses langues du monde. En ifaluk, on peut trouver plusieurs mots exprimant la colère selon la cause sociale (ex. colère d’avoir été déçu par un autre, colère de ne pas avoir su faire quelque chose etc.), ou encore la rumeur dit que les inuits ont beaucoup de manières de décrire la neige ou la glace selon ses caractéristiques.
Pour quelqu’un qui porte un intérêt à la langue, il a dû avoir vent de subtilités pareilles, et a donc articulé l’une de celles qu’il a créées d’une manière similaire ?